Je fais comme les oiseaux migrateurs : je vais vers le sud pour passer l'hiver. C'est ce que je me dis alors que je suis sur le pont du bateau qui m'amène à Hélis. Je me sens un peu mal. Mon estomac proteste contre le traitement que je lui inflige, et je sais que mon visage a pris une teinte verdâtre.  D'accord, grâce à ce jeu, j'ai appris que j'avais le mal de mer. Non vraiment, c'est parfait. J'adore. Comment ça je râle tout le temps ? Je ne peux pas m'en empêcher. C'est presque un besoin fondamental chez moi. Facile à énerver, facile à agacer, voilà comment je suis. Je suppose qu'on ne pourra guère me changer désormais. Toujours est-il que grâce au ciel, le voyage est presque terminé. C'est bien pour cela que je suis sortie de ma cabine par ailleurs. Je supposais qu'un peu d'air frais me ferait du bien. Pas tellement en fait.

Je suis fatiguée. C'est bien pour cela que j'ai pris la décision de quitter Leonith. J'ai besoin de m'isoler de tout ça, ne serait-ce que quelques jours. Et par tout ça...j'entends beaucoup de choses. L'arène, le contrat qui me lie désormais à Cerberus, les dresseurs qui viennent me voir pour me défier, les autres champions établis dans les arènes de l'île Impérion. J'aurais bien dit de mes pokémons aussi, mais ils me poursuivent partout. Je ne pensais que prendre Thémis avec moi, mais voilà, une sorte de passager clandestin s'est incrusté dans mon équipe...Quand j'y repense, la scène est presque surréaliste. Juste avant que je ne ferme l'arène pour quelques jours, un joueur dont j'ai oublié le nom m'a offert une femelle Poussifeu après un match d'arène qu'il a perdu. Selon le joueur, il l'avait achetée à la boutique mais n'arrivait pas à s'entendre avec, ils n'étaient pas en phase. Comme ce pokémon prend le double-type feu et combat, il pensait que je pourrais amener ce pokémon au maximum de ces capacités. L'idée n'est pas mauvaise, puisque je suis la spécialiste des types combat. Seulement...Le problème est dans l'énoncé. Il est de type feu.  De type FEU. Voyez un peu le tableau. Je suis très partagée vis-à-vis de ce pokémon. D'un côté, j'ai hâte de voir ce que ça va donner quand il prendra le type combat, mais de l'autre, dire que son type me gêne est très en-deçà de la vérité...Je ne sais pas quoi en faire. Aussi bien, je ferai mieux de donner cette Poussifeu à Seth, champion des pokémons feu... Je ne sais pas.

Je ne sais pas, je ne sais plus. J'ai besoin de faire le point, de réfléchir un peu à tout ça. Parfois je me dis à quoi bon. A quoi bon continuer l'arène. Si ça se trouve, ceux de Cerberus mentent en nous disant que remplir les objectifs finaux de notre classe  nous permettra de quitter Elysion. J'attends d'en voir la preuve concrète. Raison pour laquelle je ne me presse pas vraiment pour demander un match d'arène contre l'un de mes chers collègues. Et puis, ai-je vraiment envie de partir? Non. Non. Même si je le pouvais, je ne partirais pas. Je n'ai rien qui m'attende au dehors. Rien de vraiment important en tout cas. Quelques amis toujours mal à l'aise avec mon apparence, des parents qui ne parviennent plus à me regarder dans les yeux depuis l'accident. Peu de liens vraiment importants en tout cas. Pour le reste, mes études...est-ce que je m'y épanouis vraiment ? Non. Le monde extérieur n'est plus fait pour moi.

Après avoir déposé mes affaires à l'hôtel où j'avais réservé une chambre, je décide de partir explorer l'île d'Hélis. J'ai entendu dire qu'ici la nature était préservée au maximum. C'est le cas. Aucun être vivant -du moins, aucun être humain- dans les environs. C'est parfait ainsi. En venant ici, je n'avais pas l'intention de sociabiliser plus que nécessaire. J'apprécie de n'avoir à parler à personne, n'entendant que le souffle de ma propre respiration et le bruit de mes pas. Cette île devient mon royaume de solitude. Je marche tranquillement, en prenant le temps d'admirer le paysage. C'est beau et tragique à la fois. Tout est si blanc, si silencieux. Tout est tellement... pur. C'est toujours l'impression que j'ai lorsqu'il neige, quand ce manteau blanc recouvre la grisaille du monde. Tout devient plus beau. Mais j'aime aussi le printemps, il ne faut pas croire. Lorsque la neige fond au printemps, c'est comme une renaissance.

Elysion a été ma renaissance.